Véritables « artisans de la nature », les acteurs du génie écologique ont pour objectif de contribuer à la résilience des écosystèmes.
Avec l’érosion de la biodiversité et le dérèglement climatique, les services rendus par les écosystèmes se dégradent. Réparer le milieu naturel et favoriser les conditions de développement du vivant dans tout projet d’activité humaine permet alors de fortifier la capacité de résilience de la nature.
Le génie écologique met ainsi en œuvre un ensemble de techniques de coopération avec le vivant pour créer, restaurer ou réhabiliter les fonctions assurées par les milieux naturels.
« Nous sommes des artisans de la nature »
Patrice Valantin, président de l’Union Professionnelle du Génie Ecologique (La Croix septembre 2021)
En quoi consiste concrètement le génie écologique ?
Il s’agit d’un cadre méthodologique et technique. Bureaux d’études et entreprises de travaux spécialisés permettent d’accompagner les projets : en amont, grâce à la conduite d’études et la production de recommandations et en aval avec la mise en œuvre de chantiers.
Les actions de génie écologique sont très variées selon les cas et s’articulent autour de la gestion, la restauration, la création ou l’intégration de l’activité humaine dans l’écosystème.
Les applications sont nombreuses dans tout type d’espace, agricole, aquatique, urbain, industriel, dans la gestion des milieux, la prévention des risques, l’agro-écologie, la restauration ou la création d’écosystèmes ou de fonctionnalités écologiques…
Partout où une activité humaine a, a eu, ou aura un impact sur son environnement, le génie écologique peut être le moyen d’intervention permettant de mettre en œuvre un équilibre entre l’activité humaine et le vivant.
Une collaboration homme – nature
L’enjeu est de taille : faire collaborer l’homme avec la nature et réconcilier notre économie avec le vivant.
« Nous essayons de rendre compatibles l’activité humaine moderne et la résilience des écosystèmes » affirme Patrice Valantin, président de l’Union Professionnelle du Génie Ecologique (La Croix septembre 2021).
L’érosion des sols, les inondations, la perte de productivité agricole, l’accentuation des effets des sécheresses, ou la diminution de la diversité des territoires sont autant d’effets qui impactent l’économie et augmentent les risques pour les populations.
C’est ce que traduit et tente notamment de corriger la nouvelle loi Climat et Résilience, (adoptée en 2021 et publiée au JO en avril 2022), qui fixe un objectif de zéro artificialisation nette des sols à l’horizon 2050 (et 50% d’ici à 2030). Le génie écologique pourrait bien devenir l’allié indispensable à tous les projets impactés par cet objectif : l’immobilier, le tourisme, l’industrie, les collectivités locales, et tous les acteurs économiques concernés de près ou de loin par l’aménagement.
Le fameux ZAN (zéro artifcialisation nette) est d’ailleurs considéré par l’Union Professionnelle du Génie Ecologique comme un levier de taille pour l’intégration des enjeux de l’écologie dans la planification des projets. (Cf article upge)
« Rendre compatibles l’activité humaine moderne et la résilience des écosystèmes »
Patrice Valantin, président de l’UPGE (article La Croix sept 2021)
Une filière encore mal structurée mais en plein essor
La discipline reste méconnue jusqu’aux années 90 et se développe à partir de 2008 suite au Grenelle de l’environnement. Après les collectivités, ce sont les entreprises qui commencent à avoir besoin du génie écologique, autour du principe, pour tous les aménageurs, d’éviter, de réduire ou de compenser leur impact par des travaux de restauration écologique. En 2016, ce principe est rendu contraignant pour tous les porteurs de projets publics et privés.
Aujourd’hui, le secteur décolle, certainement grâce à la prise de conscience écologique. Avec plus de 7 000 emplois et un chiffre d’affaires de 530 millions d’euros en 2020 (cartographie upge 2020), les chiffres de la filière s’envolent depuis 2 ans.
La commande publique de génie écologique augmente de 24 % par an, mais n’est pas encore nomenclaturée (pas de code Naf dédié ni de mention « génie écologique » dans les appels d’offre). Les marchés de l’Etat sont ainsi évalués de manière provisoire entre 1 et 2,5 milliards d’euros, pour tous les acteurs auxquels il est pour le moment fait appel (entreprises de paysage, des TP et de l’agriculture).
Il reste encore beaucoup à faire pourtant, car les objectifs de zéro perte nette de biodiversité et de zéro artificialisation nette d’ici à 2050 sont loin d’être atteints. En France, entre 20 000 et 30 000 hectares sont artificialisés chaque année. Cette artificialisation augmente presque 4 fois plus vite que la population, et a des répercussions directes sur la qualité de vie des citoyens mais aussi sur l’environnement (chiffres du ministère de la transition écologique).
Conscients des enjeux et de la croissance exponentielle de la filière, les majors du BTP comme Vinci, Eiffage ou Colas ont internalisé les compétences de génie écologique ou créé leur propre marque. Cependant la filière manque encore de structuration et certains professionnels souhaitent que des règles déontologiques soient appliquées par le milieu, afin d’éviter les dérives ou le greenwashing. C’est en ce sens qu’en 2021, quelques acteurs du secteur ont créé le label « kalisterre », qui certifie les entreprises vertueuses.
Génie écologique et ingéniérie écologique, des compétences sensiblement différentes
La différence entre le génie écologique et l’ingénierie écologique se traduit par la conduite de projet pour favoriser la résilience des écosystèmes d’une part et l’ensemble des connaissances, techniques et pratiques prenant en compte les mécanismes écologiques pour la protection de l’environnement d’autre part. Le génie écologique applique en fait les principes de l’ingénierie écologique.
Emmanuelle Parache, fondatrice et gérante de la Scop Biocenys explique : « Les aménagements peuvent être modestes, tous ne sont pas à proprement parler des travaux de génie écologique. Ceux que nous pratiquons avec nos équipes relèvent plutôt de l’ingéniérie écologique. Au-delà de l’étude d’impact obligatoire, nous intervenons sur les projets immobiliers ou industriels pour recommander, planifier, et réaliser des aménagements tels que la reconstitution de zones humides, la compensation de perte d’habitat de certaines espèces, la création d’îlots de biodiversité… Selon la cheffe d’entreprise, les aménagements pour intégrer son activité dans l’écosystème, aussi modestes soient-ils, ont un effet positif : « Nous agissons pour que chacun fasse sa part, et comme le colibri, chaque action ajoutée l’une à l’autre peut permettre un effet de masse ».
Alors à qui faire appel ?
Jusque-là, seuls deux diplômes existaient, le bac pro Gestion des milieux naturels et de la faune, et le BTS Gestion et protection de la nature. Depuis septembre 2021, le titre professionnel d’ouvrier en génie écologique a été enregistré et est délivré par l’afpa (Association pour la formation professionnelle des adultes). Un nouveau diplôme de maîtrise d’œuvre est lancé à la rentrée 2022 par AgroParistech et l’Ecole spéciale des Travaux publics. Des programmes inter et intra entreprises sont aussi proposées par l’Union Professionnelle du Génie Ecologique. Les formations, en plein essor, permettront de repérer plus facilement les expertises.
Le Labo M a repéré des solutionneurs que vous pouvez retrouver dans l’annuaire de M Capital ici, dont voici deux spécialistes :
Carole Maurage, Co-Directrice du Labo M, pour M Capital